2011, “Antar By Zoubir”, au Musée National Nasreddine- Dinet de Bou Saada, Commissaire de l’exposition, Mr Ladjlat Mohamed

Une démarche au cœur d’une légende

par Ameziane Ferhani, Ecrivain.

Dans le paysage artistique algérien, Zoubir Hellal se distingue par l’importance qu’il accorde à la démarche créative. Il n’est pas de ces peintres qui placent le déclic de l’émotion et la spontanéité du geste au premier rang de leur travail.

Cette comparaison d’ailleurs ne vise pas à introduire une préférence entre une voie ou l’autre,toutes deux honorables, mais seulement à préciser celle choisie par Zoubir Hellal. Pour cet artiste, qui est l’un des rares en Algérie à écrire sur sa pratique, le point de départ d’une création est dans la réflexion. C’est d’abord dans son esprit que se construit l’œuvre à partir d’une idée ou d’un concept qu’il développe jusqu’à se sentir en mesure de prendre ses pinceaux.A ce moment-là, il laisse son émotion s’exprimer et lui suggérer des formes, des couleurs et un agencement de tous ces éléments.

Ainsi, tout en travaillant, son imaginaire évolue au contact de la peinture, de son support et de l’outil qui les met en contact. Ceci explique pourquoi ce peintre est attiré par des thématiques qui interrogent notre présent en convoquant le passé et, parfois-même, en préfigurant le futur. Interrogations socioculturelles sur la survivance du patrimoine dans notre vie, le rapport des représentations anciennes avec les regards présents, la question des influences extérieures sur notre culture nationale, hier par la colonisation et, aujourd’hui, au travers des médias et nouvelles technologies de communication. Interrogations philosophiques sur le choc entre la destinée et le quotidien banal, entre les légendes et les contraintes existentielles, entre la communauté et l’individu. Interrogations artistiques enfin qui l’amènent à rechercher de nouvelles voies d’expression, des façons inédites de représenter la réalité. Dans tout cela, la littérature orale ou écrite joue un rôle important. Zoubir Hellal qui est un grand lecteur, cherche ainsi à confronter de grands textes avec l’univers des formes et des couleurs.

Remiti, 1989 – Acrylique sur toile – 81 x 65 cm

L’histoire merveilleuse de Antar et Abla, qui appartient au patrimoine arabe et que chaque pays ou région, du Machreq au Maghreb, a intériorisée à sa manière, l’a amené à produire ces œuvres qui étonnent, amusent et, parfois dérangent. C’est exactement le but qu’il s’est assigné en voulant pousser ceux qui les regardent, non pas à la contemplation passive mais à la participation active à ses interrogations. Pour cela, il a choisi le moyen de la dérision qui ne consiste pas, chez lui, en une volonté de se moquer ou de faire rire. Son souci est d’introduire de la distance et du recul par rapport aux sujets traités et nous pousser à se demander ce qu’ils représentent réellement pour nous et, éventuellement, à les voir autrement. Exposer ce travail à Bou Saada revêt plusieurs significations. C’est d’abord une ville qui l’a toujours fasciné. C’est aussi un lieu où de nombreuses légendes populaire sont été créées ou diffusées.

C’est enfin là où le peintre orientaliste, Etienne-Nasredine Dinet, a conçu ses œuvres principales en puisant son inspiration dans ce qu’il voyait mais surtout dans son imagination, nourrie justement par des légendes.